Archives par mot-clé : évolution

Actualité scientifique de Jacques, Août 2017

Ce mois, je relève en particulier:
– Deux études d’épisodes d’échauffement brusques qui ont eu lieu il y a 11’000 ans et 56 millions d’années. Pour savoir ce qui va nous arriver, il est bon de pouvoir se baser sur autre chose que la modélisation informatique; l’expérience du passé est précieuse. Elle est d’autant plus inquiétante qu’elle montre que ce qui se prépare actuellement est un évènement géologique majeur à l’échelle de centaines de millions d’années. 24.8, p. 443; 31.8, p. 573. En fait, c’est complètement bouleversant au sens géophysique et psychologique du terme.
– Je suis aussi impressionné par l’élargissement du domaine CRISPR-Cas. Ceci porte à imaginer les sommets (ou les abimes) où va nous conduire la nouvelle biotechnologie. 31.8, 543.
– Deux articles de biologie de l’évolution pour lesquels j’aurai besoin de l’aide de mes collègues du DEE. Je viendrai les questionner sur l’évolution des ailes des insectes (24.8, p. 447) et la coévolution du microbiome et de son hôte (3.8, p 43).
– Petite pensée émue pour feu l’ami Jürg Tschop à l’occasion des 15 ans de l’inflammasome. 31.8, 534.
– Le discours intérieur – quand on se parle à soi-même – me parle. J’aimerai échanger mes observations avec celles d’autres personnes. Si quelqu’un en a l’envie, je suis preneur. Sci. Am. 1.08, p. 68.
– Et bien sûr, l’affaire des résultats irreproductibles (24.8, p. 387) à propos de laquelle j’ai aussi quelque chose à dire. Nous y reviendrons.
Courage et joyeuse lecture.

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Nature et autres lectures scientifiques de Jacques en janvier 2017

 

La livraison de ce mois contient peut-être quelques articles difficiles. Pourtant, plusieurs sont splendides. J’ai pris un plaisir particulier à ceux-ci:

19.01.17. Génomique des migrations humaines. On disait que nos méchants ancêtres ont éliminés, vite fait bien fait, leurs cousins néanderthaliens et denisovans. Ce n’est en tous cas pas complètement vrai. Ils ont au moins un peu frayés ensemble, peut-être même se sont-ils simplement mélangés. Nous en sommes les descendants, probablement à notre grand avantage.

26.01.17. Pour pusieurs d’entre nous, les bactériophage ont été une grande affaire. Nous avions aimé le « Genetic switch » de Ptashne qui montrait comment le bactériophage lambda choisit son parcours de vie. Ici, même problème, non pas au niveau de l’individu mais à celui de la population. Ensemble ils sont plus malins que tout seuls; leur truc est révélé.
26.01.17. Le fonctionnement du ribosome. Trois articles pour montrer comment le ribosome encrassé est débloqué. C’est de la chimie par cryo-microscopie électronique. Impressionnant!

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GOF, pourquoi des virus plus dangereux ?

GOF, gain-of-function-research, vise à explorer comment des organismes pathogènes pourraient devenir plus dangereux encore. Cette recherche pourrait être utile; elle pourrait aussi être dangereuse. Le débat est ouvert. Le point avec un article pour la lettre No. 23 du GIPRI.

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Les souffrances de l’interdisciplinarité (3) : Emergence et développement du langage humain

Nicolas Duruz m’a soumis l’article suivant pour lecture et discussion.

Lassègue, J., et al. (2009). Économie symbolique et phylogenèse du langage. L’Homme. Editions de l’E.H.E.S.S. 192: 67 – 100

Il est disponible en ligne à l’adresse :

http://www.cairn.info/revue-I-homme-2009-4-page-67.htm.

Du résumé des auteurs je tire en particulier :

  • L’évolution en direction des langues modernes est intimement liée à l’émergence de nouveaux systèmes sociaux et symboliques, incarnés dans de nouvelles pratiques.
  • Le « symbolique » ne relève pas d’une compétence privée engendrée par une capacité cérébrale, couplée à des contraintes environnementales. Le « symbolique » repose intrinsèquement sur une activité sémiotique publique, qui constitue un objet d’intérêt en soi.

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Transcendance

Alison Jolly est morte le 6 février. Il est bon de se souvenir d’elle [1].
Figure 1
Alisson Jolly
Primatologiste remarquable, elle a mis en évidence, dès les années 60, chez les lémurs de Madagascar, une organisation sociale où les femelles sont dominantes. Avec son mari, économiste du développement, elle s’est engagée pour qu’il soit tenu comptes des populations locales et de leurs besoins spécifiques dans les politiques de développement durable. Avec lui, elle a aussi eu 4 enfants – et autant de petits-enfants – pour lesquels elle a écrit une collection d’histoires illustrées. Pas mal ! Ici nous voulons retenir une autre de ses contributions. À une époque où l’idée générale voulait que « l’outil fait l’homme », c’est elle qui, dès le début de son travail, a promu l’idée que la socialisation est le moteur de l’évolution humaine (Jolly 1999). L’idée vaut la peine d’être suivie. Résumé : Nous posons une hypothèse : l’émotion transcendantale est dans la nature humaine, comme l’est, par exemple, la compétence à acquérir le langage. Nous verrons : (i) l’origine évolutive de cette faculté; (ii) en quoi agit-elle ici et maintenant ; (iii) quelles conséquences devons-nous en tirer ? Continuer la lecture de Transcendance

The Wonder of the Commons

Pour y penser, nous avons:
– Harding (1968) The Tragedy of the Commons.
– Le cours de même intitulé organisé par Christine Clavien à l’UNIL cet automne.

Le problème est que les gens se disputent les biens communs au lieu de les faire fructifier ensemble.

On peut, en effet, considérer les choses de cette façon, mais une vision évolutive comme une vision historique montrent plutôt le contraire. Considérant d’où ils viennent, je trouve plutôt  étonnant et admirable que les humains collaborent si bien. Affaire de verre à moitié vide ou à moitié plein. Continuer la lecture de The Wonder of the Commons

L’espèce en biologie: une histoire de sexe.

Ça n’est pas ce qui est qui compte,
C’est l’histoire,
C’est l’histoire,
La façon dont on la raconte
Pour le faire savoir.

Selon Yves Duteil

J’apprécie le groupe ∏ pour la culture de chacun et la bienveillance de tous. Récemment, nos réflexions se sont d’avantages tournées vers la biologie. Nous discutons de questions telles que: « Qu’est-ce que la vie ? », ou « L’épigénétique donne-t-elle raison à Lamarck contre  Darwin? »  Lors d’une des dernières rencontres, nous avons parlé d’espèces et j’ai cru comprendre que, pour plusieurs d’entre nous, le concept semble être un construit culturel plus qu’une réalité naturelle. Cela n’est pas une surprise, à ∏, le mot devient souvent le fait. La tendance est semblable dans le livre de Kupiec (2013) sur lequel Françoise a attiré notre attention. Pas de surprise là non plus, le sujet annoncé porte sur l’histoire et ses débats.

Dans ce qui suit, je vais essayer de ramener le mot à son concept et de montrer que, chez les eucaryotes qui se reproduisent sexuellement, il s’agit d’une solide réalité naturelle. Continuer la lecture de L’espèce en biologie: une histoire de sexe.

Recenssion avec suite: Azar GAT, War in Human Civilization (2006)

Au Biophore, le bâtiment de biologie de l’UNIL, j’occupe la chambre attenante à celle du professeur Laurent Lehmann, dont la spécialité est la modélisation de la coévolution des gènes avec le comportement social. Par exemple, il cherche à comprendre ce qui fait évoluer les sociétés vers des formes pacifiques ou, au contraire, des formes violentes. Cette approche évolutionniste est remarquablement fructueuse. En particulier, elle a permis de sortir du vieux débat stérile entre hobbésiens (l’homme est mauvais, la société peut le contrôler) et rousseauiste (l’homme est bon, mais la société le pervertit) en remontant aux racines de ces deux parts de vérité. Laurent est sympa, il discute volontiers. Il me donne aussi à lire, par exemple, le livre de Gat dont il est question ici qui trace une vaste fresque de l’histoire humaine à travers le phénomène guerre. La largeur de vue et l’ampleur du savoir est de la veine de « Guns, germs and steel » de Jared Diamond (Diamond 1998). J’ai fait du livre de Gat une courte recension actualisée à ma sauce pour la 19e lettre du GIPRI. Bonne lecture ! Continuer la lecture de Recenssion avec suite: Azar GAT, War in Human Civilization (2006)